Les livrets bancaires au plancher

13 mai 2016
PAR NICOLAS PEYCRU

Mais jusqu’où va tomber la rémunération des livrets d’épargne bancaire ? Après avoir enregistré un petit 0,57% en février, le taux moyen de ces livrets commercialisés par les banques a encore baissé pour atteindre 0,53% en mars dernier, selon les dernières statistiques de la Banque de France rendues publiques le 3 mai 2016. Pour comprendre l’ampleur de leur déconfiture, il faut savoir que ces placements offraient un an plus tôt un rendement moyen de 0,86%. Soit une chute de 0,33 point en l’espace de 12 mois.

Pire : cela fait depuis octobre 2014 que ces livrets dits « ordinaires » proposent une rémunération inférieure à celle du Livret A. L’écart ne cesse de se creuser avec le livret d’épargne réglementée dont le taux a pourtant été abaissé de 1% à 0,75% au 1er août 2015. En valeur nette, le « gap » est encore plus grand.

Contrairement au Livret A entièrement défiscalisé, les (faibles) intérêts des livrets bancaires sont en effet assujettis aux prélèvements sociaux (CSG, CRDS…) à 15,5% et à l’impôt sur le revenu. Pour un foyer fiscal soumis à une tranche marginale d’imposition (TMI) de 14%, un livret de banque a rapporté in fine à peine 0,37% en moyenne en mars 2016. Avec une TMI de 30%, le taux net est tombé à 0,29%. Pas de quoi faire rêver l’épargnant…

Et pourtant, toujours d’après la Banque de France, les versements sur les livrets bancaires ont dépassé les retraits de 2,43 milliards d’euros en mars 2016. Depuis le début de l’année, la collecte nette a atteint 5,95 milliards d’euros. Or, sur la même période, celle du Livret A est négative de 1,01 milliard d’euros, selon les données de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) publiées le 21 avril 2016. On nage en plein paradoxe.

Plusieurs explications peuvent être avancées. Certes, les taux des livrets bancaires, dont le niveau est fixé par chaque banque, ne sont pas mirobolants. Mais la Banque de France ne prend pas en compte les bonus de 5% durant quatre mois et autres chèques de bienvenue de 100 euros que les établissements financiers mettent régulièrement en place pour doper leur produit maison. Certains Français se sont fait une spécialité de cette chasse aux primes et n’hésitent pas à ouvrir et fermer des livrets au gré des campagnes de promotion.

En outre, la baisse de la rémunération du Livret A est largement médiatisée et entraîne, à chaque fois, des mouvements de décollecte massive. Celles opérées par les banques sur leur livret sont plus éparses et nettement moins visibles. L’effet de « panique générale » est bien moindre.

Enfin, les livrets ordinaires ne sont pas plafonnés comme le Livret A. On peut imaginer que des épargnants ayant atteint le plafond de 22.950 euros sur leur livret réglementé soient amenés à placer leurs économies sur leur livret non réglementé. Sans parler des versements automatiques, une pratique assez répandue sur les livrets bancaires car fortement mise en avant par les établissements. De quoi fidéliser les clients. Une stratégie visiblement gagnante pour les banques.

Auteur – Nicolas Peycru

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