Les nuages s’amoncellent au-dessus des fonds en euros. Cela fait déjà des années que ce placement chouchou des Français (il représente 85% de la collecte des contrats d’assurance vie) voit sa rémunération décliner. Majoritairement investi en obligations, ce support souffre de la baisse des taux d’intérêt des emprunts d’Etat engendrée par les rachats massifs de dettes souveraines par la Banque centrale européenne (BCE) et par la défiance des investisseurs vis-à-vis des marchés boursiers.
Dépassant 5% au début des années 2000, le rendement moyen est tombé à 2,30% en 2015, selon l’Association française de l’assurance (AFA) qui regroupe la quasi-totalité des assureurs vie tricolores. D’après le Baromètre Epargne Vie présenté le 15 mai 2016 par Fact & Figures, son taux pourrait se situer sous la barre des 2% cette année. Le cabinet de conseil pronostique une rémunération moyenne des fonds en euros de seulement 1,95% en 2016.
Certains contrats, notamment bancaires, proposent déjà un rendement de 1,80% en 2015. Et que dire des « vieux » fonds en euros fermés à la commercialisation et dont les rémunérations ne sont plus communiquées par les assureurs ! Il n’empêche, pour nombre d’experts, les performances offertes par les contrats d’assurance vie en euros sont encore trop élevées.
Comme avant lui son prédécesseur Christian Noyer, le nouveau gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau appelle les banquiers et les assureurs à faire preuve de davantage de modération dans la rémunération des fonds euros. Une supplique également entonnée par Bernard Delas, le vice-président de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le gendarme des banques et des assurances.
Les deux hommes estiment qu’en proposant des fonds euros aux rendements encore non négligeables, les assureurs vie ne poussent pas les Français à investir dans d’autres placements davantage orientés vers le financement de l’économie, comme les actions d’entreprise. Les nombreuses recommandations de la Banque de France et de l’ACPR n’ayant pas eu d’effet jusqu’ici, voici venu le temps de la manière forte.
Un amendement a été adopté le 23 mai 2016 dans le cadre de l’examen du projet de loi Sapin 2 renforçant sensiblement les pouvoirs du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF) en matière d’assurance vie. Si elle le juge nécessaire, l’autorité macro-prudentielle française chargée d’exercer la surveillance du système financier pourra restreindre l’acceptation des primes et versements sur les contrats. Le HCSF pourra également « suspendre, retarder ou limiter, pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat, la faculté d’arbitrages ou le versement d’avances sur contrat. »
Surtout, le Haut Conseil pourra, sur proposition du gouverneur de la Banque de France, moduler les règles de dotation et de reprise de la provision pour participation aux bénéfices. En obligeant les assureurs à renforcer leurs réserves financières, le HCSF limitera fortement leurs marges de manœuvre. En clair : ils pourront moins facilement puiser dans leur riche trésor de guerre pour continuer à servir des rendements élevés en dépit des faibles taux d’intérêt.
Avec cet amendement, les assureurs vie se retrouvent, en quelque sorte, avec un révolver sur la tempe. Dans ces conditions, ils devraient plus facilement obtempérer aux injonctions des autorités. Le rendement des fonds euros n’ont pas fini de sombrer…
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